Congrès de l’USH : appelons l’Etat à agir face à la crise du logement

Du 24 au 26 septembre, se tient le congrès HLM de l’Union sociale pour l’habitat. A l’heure où la France se trouve plongée dans une crise du logement d’une extrême violence, cet événement s’impose comme un moment décisif dont les acteurs territoriaux doivent s’emparer pour appeler l’Etat à prendre ses responsabilités en proposant des mesures d’envergure.

10,4 Millions de français sont locataires dans les parc social. 2,6 millions de ménages sont aujourd’hui demandeurs d’un logement social, soit une augmentation de 24 % en 5 ans . Dans le même temps, on dénombrait en 2023 plus de 330 000 personnes sans domicile fixe et plus de 2800 demandes d’hébergement par soir émanant d’enfants et restant sans réponse. Ce constat sans appel et qui ne cesse de s’aggraver, impose un sursaut collectif.

La progression très forte de la demande Hlm est le symptôme d’une politique du logement qui depuis 2017 n’a jamais pris les options nécessaires pour répondre au besoin de logement de nos concitoyens, quels que soient leurs revenus, dans tous les territoires. Baisse des APL, prélèvement sur les organismes Hlm via la RLS, hausse du taux de TVA, suppression du PTZ et de l’APL accession, sous-estimation permanente du besoin d’accompagnement des objectifs de rénovation énergétique dans le parc social, affaiblissement de la loi SRU… Le logement social a été fortement déstabilisé

Au final, ce sont 14 milliards d’euros qui ont été pris au logement social depuis l’été 2017.  La mise en place de la RLS n’a été partiellement compensée que jusqu’en 2022. Depuis, alors que l’inflation pèse lourdement sur le taux du livret A et les coûts de production, aucune mesure de compensation n’a été déployée. Dans le même temps, le nombre d’agréments de logements sociaux a chuté dramatiquement. Par rapport à la programmation 2016, ce sont 182 300 agréments de logements qui ont été sacrifiés par ces décisions budgétaires.

C’est un fait, la France traverse une grave crise du logement en général, et du logement social en particulier qui a pour origine  les mesures politiques et budgétaires prises depuis 2017 qui ont réduit sensiblement la capacité de production et de rénovation des bailleurs sociaux, baissant massivement les aides au logement. Cette crise a été amplifiée par des éléments du contexte économique tels que la hausse des taux d’intérêts ou des coûts des matières premières.  Les organismes Hlm ont ainsi été privés de plusieurs milliards d’euros de fonds propres, prélevés sur les loyers des locataires au profit du budget de l’Etat.

La crise de l’offre de logement ne se réduit pas au nombre. A cela s’ajoute l’urgence de l’adaptation du parc aux défis de la transition écologique. Le secteur du bâtiment représente 44 % de l’énergie consommée en France et produit chaque année plus de 120 millions de tonnes de CO2, soit près du quart des émissions nationales. Ces chiffres font de la filière Bâtiment l’un des secteurs clé dans la lutte contre le dérèglement climatique et nécessitent de rénover massivement le parc existant. Le parc Hlm, avec plus de 5 millions de logements, a un rôle majeur à jouer dans l’atteinte de ces objectifs, même si le parc social présente d’ores et déjà de meilleures performances énergétiques et environnementales que le parc privé. Rappelons en effet que sur les 30 millions de résidences principales que comptait la France au 1er janvier 2022, environ 17 % du parc étaient des « passoires énergétiques » (étiquettes F et G du DPE).

Nous sommes convaincus que la transition écologique est un levier d’amélioration de la qualité de vie et du pouvoir d’achat des ménages modestes. Ces objectifs ambitieux nécessitent des stratégies patrimoniales adaptées et soutenues ; de la visibilité pluriannuelle sur les modalités d’intervention et les financements.

Ainsi, nous, élus en charge de l’habitat et du logement dans les agglomérations françaises, soutenons les revendications du mouvement HLM, avec notamment :

 – La suppression de la Réduction de Loyer de Solidarité (RLS), inventée à l’été 2017 pour masquer les effets de la baisse des APL pour les locataires du parc social. Depuis 2018, ce sont plus de 8 milliards d’euros qui ont été détournés du logement social par la RLS, avec pour effets la chute de la production et la diminution des dépenses d’entretien. La suppression de la RLS est essentielle pour permettre aux organismes Hlm de produire plus de logements sociaux et pour améliorer la qualité de service due aux locataires du parc social ;

– Le rétablissement d’un taux de TVA réduit à 5,5 % pour l’ensemble de la production et de la rénovation du parc social. Le logement est un bien de première nécessité et il doit être taxé en conséquence ;

– L’augmentation de la part de logements sociaux fixée par les PLU à 50 % avec une relance du financement du financement du logement très social (PLAI et PLUS)

– La pérennisation et l’amplification du plan de financement de la rénovation énergétique du parc social et le soutien au dispositif de « Seconde vie » des bâtiments doivent bénéficier d’une visibilité pluriannuelle. Dès à présent les gels de crédits décidés à l’été doivent être levés et l’Etat doit respecter la parole donnée il y a quelques mois à peine ;

L’amplification de la loi SRU. La loi SRU est utile. En 20 ans, elle a permis la production de 900 000 logements sociaux. Mais en 2023, il manquait encore 551 350 logements sociaux dans les 1 161 communes déficitaires. Cette situation appelle une réponse ferme de l’Etat, qui doit se donner les moyens d’accompagner les collectivités locales pour qu’elles appliquent la loi sans la contourner.

Cette orientation pour le logement social doit bien sûr s’inscrire dans une stratégie globale avec parmi les priorités, la lutte contre la vacance ( 3 119 000 logements vacants en 2022 selon l’Insee), l’encadrement des loyers et du foncier dans le parc privé, des engagements financiers à la hauteur des enjeux de rénovation énergétique (environ 9,3 milliards d’euros par an au niveau national), une déconcentration des fonctions et activités en dehors des métropoles.

Aujourd’hui la vie et le quotidien de milliers d’individus est en jeu. L’ensemble des représentants politiques de notre pays se doit d’agir en responsabilité et de faire de l’accès à un logement pérenne et digne une priorité absolue.

Signataires :

Patrick Chaimovitch, Maire de Colombes et Vice-président de la Métropole du Grand Paris

Anne de Rugy, Co-présidente du groupe écologiste et conseillère à la Métropole du Grand Paris

Sylvain Raifaud, Co-président du groupe écologiste et conseiller à la Métropole du Grand Paris

Fatoumata Koné, Vice-président de la Métropole du Grand Paris et Présidente du groupe écologiste à la Ville de Paris

David Belliard, Adjoint à la maire de Paris chargé des mobilités et conseiller à la Métropole du Grand Paris

Marie-Pierre Marchand, conseillère à la Métropole du Grand Paris

Karina Perez, Conseillère à  la Métropole du Grand Paris

Antoine Maurice, Président du groupe Toulouse écologiste et solidaire à la Métropole de Toulouse

Renaud Payre, Vice-Président de la Métropole de Lyon

Benjamin Soulet, Adjoint à la Maire de Strasbourg et conseiller à l’Eurométropole de Strasbourg

Sébastien Barles, Adjoint au Maire de Marseille délégué à la transition écologique et conseiller à la Métropole Aix-Marseille-Provence

Aicha Guedjali, conseillère municipale déléguée à l’habitat insalubre